TEST 15 JOURS

Luc Wise (The Good Company) : “Les annonceurs doivent évaluer les agences également sur des critères sociétaux et environnementaux”

L'ancien dirigeant d'Herezie et de Publicis, fondateur en 2019 de The Good Company, agence positionnée sur la communication responsable, souligne la nécessité de revoir les critères de sélection et de notation des agences pour mieux surmonter la crise.

Par Jean-Michel De Marchi. Publié le 16 mai 2020 à 17h59 - Mis à jour le 16 mai 2020 à 17h59

1) Quelles sont les principales questions que pose la crise actuelle sur la relation entre agences et annonceurs ? 

De façon globale, la crise du Covid-19 a été porteuse d’une accélération des tendances préexistantes. Et ce qui est vrai au niveau “macro” l’est aussi au niveau “micro” : au niveau “macro”, nous sommes confrontés exactement aux mêmes questions sociales et écologiques qu’avant la crise : catastrophes écologiques, inégalités sociales, nouveaux modes de travail, vieillissement de la population… Sauf que celles-ci sont posées de manière plus urgente et accrue. Au niveau des relations entre agences et annonceurs, c’est pareil. Cette crise a mis à nu des questions qui se posaient déjà ; l’intégration de critères sociaux et écologiques dans les processus de communication, l’utilisation des budgets de communication comme “variable d’ajustement” par les annonceurs, la sincérité des approches RSE des marques, le sujet de la juste rémunération des agences, de l’équité des compétitions, du bon équilibre entre performance à court-terme et à long-terme, etc. 

2) Les entreprises vont être contraintes à des restrictions budgétaires. Cela pourrait entraîner des tensions fortes avec les annonceurs : sur les contrats en cours, sur des exigeances de productivité, des remises en compétition… 

Les conséquences de la crise seront à la fois positives et négatives pour nos relations avec les anonceurs. Car il n’y a pas un seul type d’agence, tout comme il n’y a pas un seul type d’annonceur. Là aussi, je pense qu’une forme d’analogie entre la crise “en général” et la crise “appliquée” à notre secteur peut être utile. Au niveau mondial cette crise va – de façon générale – radicaliser les diverses positions du “monde d’avant”. Par exemple, ceux qui souhaitaient plus d’ouverture, de coordination et de coopération au niveau international se sentiront renforcés dans leurs convictions. A contrario, ceux qui appelaient déjà, à plus de souveraineté et de protectionnisme au niveau national en tireront les conclusions inverses.

Je pense qu’il y aura la même polarisation des points de vue dans les agences et chez les annonceurs. Ceux qui étaient déjà convaincus de la nécessité de modes de travail plus collaboratifs, plus partenariaux, plus respectueux et transparents dans les relations agences-annonceurs, s’efforceront de faire entendre leurs voix. Et ceux qui considéraient que la ” com’ ” n’était qu’un besoin ponctuel, une variable d’ajustement à couper et réduire, couperont les budgets avec d’autant plus de férocité au regard de la crise économique en cours. On le constate déjà au sein des entreprises, où s’affrontent ceux qui estiment qu’il est plus que jamais vital de communiquer pour démontrer son engagement et sa responsabilité, et ceux qui estiment que la priorité est de réduire les couts coute que coute, peu importe l’impact à plus long terme. Des points de vue extrêmement divergents peuvent s’affronter au sein d’une même structure. Aussi bien en agence que chez l’annonceur.

3) Quel “new deal” imaginer entre agences et annonceurs ?

Il y aura beaucoup à dire et à écrire sur ce point. Cette “crise totale” – à la fois sanitaire, sociale et économique – met annonceurs et agences sous tension et nous oblige à reconsidérer nos modes de fonctionnement. On doit se servir de cette crise pour réinventer notre relation – aussi bien en termes économiques, sociaux et environnementaux – pour notre bien commun. Je formule deux souhaits sur ce point : le premier, que les entreprises qui ne cessent de répéter l’importance de la prise en compte de leurs “partie prenantes”, n’oublie pas que leurs partenaires en matière de communication font aussi partie de leurs “parties prenantes”. Le deuxième, que l’évaluation des agences et de leur valeur ajoutée, se fasse sur des critères économiques, mais aussi sur des critères sociétaux et environnementaux. C’est déjà le cas pour certains bonus managériaux chez les annonceurs. Pourquoi pas pour les agences ? 

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